Lully,

Musicien de Cour

Ambitieux, doté d'une force de caractère surprenante, Jean-Baptiste Lully réussit magnifiquement sa carrière. Arrivé d'Italie, il sait captiver l'amitié du jeune Louis XIV qui fait de lui le maître d'œuvre de la production musicale française au XVIIe siècle, en particulier de l'opéra de style français.

L'origine familiale de Giovanni Baptista Lulli reste méconnue. On sait seulement qu'il naît dans un milieu modeste en 1632 à Florence. C'est le chevalier de Guise qui découvre le premier son talent en 1646. Il fait conduire le jeune homme à Paris pour servir la Grande Mademoiselle (la Montpensier) comme garçon de chambre. Cette charge lui laissant suffisamment de temps libre, Lulli perfectionne son éducation musicale et devient rapidement un danseur et un violoniste accompli, puis un compositeur virtuose.

 

L'indéfectible amitié du roi Soleil

Ayant choisi le parti du jeune Louis XIV lors de la Fronde des princes menée par Condé en 1652, Lulli est admis dans le proche entourage du monarque. Courtisan, son premier trait de génie est de séduire le roi dont l'amitié ne lui fera jamais défaut. Nommé en 1653 compositeur de la musique instrumentale, poste dans lequel il succède à Lazarini, il crée les " Petits Violons ", pendant intimiste des " Vingt-Quatre Violons du roi ". Il connaît alors ses premiers succès : rédigé et interprété en 1657, son " Ballet de l'amour malade " est un triomphe qui lui ouvre, en 1661, la charge de " surintendant de la musique " ce qui lui permet de contrôler toutes les pièces jouées à la cour. La même année, Louis XIV lui accorde la nationalité française. Son nom est francisé en Jean-Baptiste Lully. Un an plus tard, il épouse la fille du musicien Lambert qui fut son premier maître. Lully entame alors une collaboration féconde avec Molière, " l'autre grand Baptiste ", pour reprendre l'expression des chroniqueurs de l'époque. Toutes les comédies-ballets ou pastorales écrites par l'homme de théâtre retentissent des accords de Lully " Le Mariage forcé ", " L'Amour médecin " en 1665, " Georges Dandin ", " Monsieur de Pourceaugnac " en 1669, " Le Bourgeois gentilhomme " en 1670. L'homme, habile en affaires, amasse une fortune considérable.

 

Un maître ambitieux au Palais-Royal

En 1672, Lully se brouille avec Molière qui le concurrence dans l'affection du roi et que ses provocations rendent décidément infréquentable. Sans état d'âme, il s'empare du théâtre du Palais-Royal à la mort du dramaturge en 1673, évinçant Marc-Antoine Charpentier, son grand rival. Parallèlement, il obtient de l'Académie royale de musique le privilège du " théâtre en musique " qui lui confère une mainmise complète sur le lyrique français. Son activité de compositeur est alors frénétique et le nombre de ses œuvres lui permet de faire exclusivement jouer sa musique dans le théâtre qu'il dirige, au grand dam des autres compositeurs de l'époque, Il compose " Alceste " en 1674, " Thésée " en 1675, " Psyché et Bellérophon " - dont le livret est dû à Corneille - en 1678, " Phaéton " en 1683, " Roland " en 1685, " Armide " en 1686. Sa dernière grande victoire, en 1681, six avant sa mort tragique, lui est offerte par " Le Triomphe de l'amour ". A son apogée, il est une fois de plus distingué par le roi Soleil qui le nomme secrétaire et lui attribue un titre de noblesse.

 

Le créateur de l'opéra français

Homme de cour rusé, Lully impose son style à la musique française en profitant de sa position auprès du roi. Son talent ne se limite pourtant pas aux intrigues et ses créations manifestent une réelle inventivité. Sensibilisé par sa collaboration avec Molière à une diction naturelle, il introduit dans l'opéra un chant moins ampoulé, plus proche du parler usuel. Il confie au chœur un rôle nouveau qui dépasse le simple rappel des morceaux de choix interprétés par les solistes. Enfin, il recourt à des orchestres de taille restreinte dont la fonction est de créer une ambiance. Ses compositions fixent les formes classiques de l'opéra de style français : cinq actes précédés d'un prologue et d'un ballet.

Lully, autant inspiré par le genre italien que par le genre français, aura réussi la synthèse originale des deux tendances. Son héritage sert longtemps de modèle, jusqu'à Gluck ou Rameau. Il peut paraître surprenant que ses œuvres soient si peu connues de nos jours. Par delà la désuétude d'un genre, cette lacune s'explique en partie parce que le favori du roi fit rarement éditer ses partitions. La redécouverte de pièces vieilles de trois siècles nécessite un énorme travail de recherche de la part des musicologues modernes.

 

UNE BAGUETTE FATALE...

La mort de Lully ressemble à une mauvaise plaisanterie.

Pied de nez ironique à la fortune qui l'avait toujours servi... pour mieux le desservir sur sa fin. C'est lors d'une représentation en présence du roi que le musicien frappant la mesure avec un lourd bâton se blesse gravement le pied avec son ustensile. Béante, la plaie s'infecte et la gangrène s'installe. En quelques jours, la jambe est gagnée par la pourriture. Malgré la violente douleur qui l'assaille jour et nuit, le compositeur n'en poursuit pas moins son labeur fébrilement. Une anecdote voudrait qu'il ait confié au prêtre qui venait de le confesser sur son lit de mort l'emplacement d'une dernière œuvre tenue au secret dans sa chambre.

 

Extraits musicaux accessibles avec REAL AUDIO PLAYER :

Jean baptiste LULLY(1632-1687)

Grands Motets
extrait : Te Deum

Les airs de Trompettes, Timbales et Hautbois

 

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